C'est l'histoire d'une industrie qu'on n'aime pas voir, installée au bord de mer, et reliée à la planète par des milliers de bateaux. C'est l'histoire d'une plage blonde, ses coquillages et ses palmiers, et les tankers toujours présents sur la ligne d'horizon, comme des fantômes. C'est une histoire de raffinerie qui nourrit notre quotidien à tous. Nous sommes à Fos sur Mer avec ses sites Seveso et ses emplois, ses habitants et ses touristes… "Ces zones de mutation, "d'entre-deux", ont pour moi quelque chose de fascinant. Que deviendront-elles demain, comment évoluera cette région en fonction de notre consommation? Quelle place pour l'homme, la nature...? Aujourd'hui, je regarde. Je me souviens que depuis toujours la vie avance "de commencement en commencement"... Au cœur de ces territoires agressifs, le format panoramique 6x17 que je choisis nous parle des personnes d'ici et de nous. Mon intérêt demeure toujours l'Homme."
Dans cet océan des grandes marées, animé par les pêcheurs à pied, il s'agit pour moi d'observer l'Homme dans ses "pas de côté" ses "échappées". Couleur et noir et blanc panoramique pour un temps de poésie, car il se vit là des moments hors du temps, en quête de silence, d'immensité, parfois même de non agir. Dans la solitude, en famille ou entre amis ils parcourent d'immenses étendues découvertes à la recherche de crevettes, palourdes, coques… équipés des mêmes outils depuis toujours, aux noms différents selon les lieux, sous le soleil ou le mauvais temps. Avec sa gestuelle inchangée, cette pêche d'un autre temps se transmet joyeusement dans un univers d'abstraction et de pragmatisme.
Rechercher l'Homme dans les traces de sa présence, parfois monumentale parfois discrète, interroge forcément sur sa cohabitation avec la nature qui, à de rares exceptions près, est toujours façonnée par l'homme et ses activités, utiles, indispensables, harmonieuses ou agressives. Cette première série évoque les interventions de l'homme sur la terre et sur la mer à travers les graviers, le sel, les huitres. Je choisis le format panoramique et le noir et blanc pour accueillir ce monde quotidien, technique et beau malgré lui. Des paysages graphiques naissent de ces quantités de matière "première" qui entrent dans notre consommation banale ou festive.
La série "Enroulements" s'inscrit dans mon parcours des territoires ordinaires. Ces lourdes boules d'herbe, enrubannées de plastique, sont les nouveaux repères de notre agriculture contemporaine. Un nouveau repère qui marque le territoire, dans un voyage juste à côté, où le paysage devient pour moi architecture, et m'offre ces constructions monumentales, ces chaos effondrés, ces surfaces énigmatiques. Je reviens souvent, séduit par ce minimalisme parfois brutal des objets singuliers devenus présence esthétique gratuite, des "mastabas de Christo" spontanés.
Dans cette première série je fais le choix du noir et blanc pour cette architecture béton des 20° et 21° siècles au service de l'audace des lignes, pour en accentuer la rigueur, souligner la créativité, l'explosion de la lumière et mettre en valeur les courbes sensuelles. Les gestes architecturaux qui me parlent m'ont porté naturellement vers des lieux priants, d'habitation ou de monstration culturelle.
"La question du monde moderne, c'est vraiment l'humanité… Jacques Tati avait tout compris."
La question est là sur ce chantier d'une prison écroulée d'où surgissent déjà les premiers bâtiments des futures habitations. Une histoire d'humanité, une histoire de murs. A travers des images crues, parfois voilées, souvent blanches le chantier se découvre, le bâtiment se transforme. De murs qui enferment il veut devenir murs qui accueillent. En ces temps de transition et d'errance, de murs qui séparent en voulant protéger les uns des autres, qu'en est-il de nos propres enfermements? Contradiction de notre société de surabondance et de manque abyssal, où l'Homme toujours cherche sa place.
La question est là sur ce chantier d'une prison écroulée d'où surgissent déjà les premiers bâtiments des futures habitations. Une histoire d'humanité, une histoire de murs. A travers des images crues, parfois voilées, souvent blanches le chantier se découvre, le bâtiment se transforme. De murs qui enferment il veut devenir murs qui accueillent. En ces temps de transition et d'errance, de murs qui séparent en voulant protéger les uns des autres, qu'en est-il de nos propres enfermements? Contradiction de notre société de surabondance et de manque abyssal, où l'Homme toujours cherche sa place.
"Le photographe-artiste dialogue avec l’artiste-architecte en donnant à voir ce que ce dernier avait sans nul doute pressenti , imaginé : des passages, des signes, des indices, surgis de la conjonction du temps et de l’espace : textures magnifiées par la fugacité d’un éclat de lumière, ombres, jeux de lignes, de formes, que le cadre de l’image isole dans la syntaxe singulière de la photographie… Ces images parlent autant d’immatérialité que de réalité tangible. Ce travail ne se propose pas de dresser un inventaire des églises, monastères ou chapelles imaginées par les architectes de notre époque. Il propose seulement quelques stations dans un cheminement au long cours. D’autres lieux viendront, d’autres images aussi. L’auteur n’a pas abandonné sa quête d’une connexion, au delà du temps, avec les architectes du sacré."
Depuis des années ce trait de côte en béton de Marseille me fascine. Ce béton ! Dans mon travail je le regarde à travers l’architecture des XX et XXI siècles où il porte toute la spiritualité contemporaine, et les audaces de l’habitat nouveau. Ici il se fait, face à la mer, protection de nos espaces et accueille des moments de rencontre comme suspendus. Regarder la mer, se dorer au soleil, pécher, dormir ou même téléphoner. Saluer ce David en creux dans le béton, tourné vers la ville et la Méditerranée. Plus loin, notre regard se perd sur l’horizon lumineux ou embrumé, se pose sur les îles, s’évade…
Les carrelets réunissent deux de mes grandes passions : Architecture et Paysage de mer. Au départ, architecture pauvre qui persiste et évolue peu. Élément fragile, souvent massacré par les grandes marées, les tempêtes et qui exige beaucoup d’entretien. Pour les propriétaires passion du bricolage autant que de la pèche. Lieu de replis solitaire ou de partage entre amis selon les personnes et les moments. Formes différentes mais présence un peu partout dans le monde. Mais c’est mon territoire proche qui m’intéresse en priorité. Série commencée depuis très longtemps et toujours en cours, 3.7.9 est l’évènement qui me bouscule et me motive pour enfin montrer ces images toujours d’actualité. Mes séries n’ont souvent pas de fin et je travaille les carrelets au fil du temps en tous formats ce qui implique aujourd’hui une gymnastique pour harmoniser le tout en carré et stimule ma créativité. C’est l’occasion d’une série spéciale autour de l’image dans l’image exprimée en 15 réalisations ce qui est bien mon rythme habituel. Un nouveau séjour à Blaye en permet la concrétisation. Le choix de ne sélectionner que des photos en noir et blanc re-photographiées en couleur dans leur milieu initial souligne les périodes de prise de vue. Mais en arrivant sur les lieux, une évolution me frappe. En 2023 les carrelets sont tous cadenassés et mêmes équipés, pour certains, de caméras de surveillance. Mon dispositif initial est donc modifié par cette nouvelle réalité. Le carrelet rentre dans mon corpus de photos du bord de mer : Les pêcheurs à pied, les huîtres, le sel, le littoral, les estuaires… Des thèmes du quotidien qui m’offrent une aventure jamais très loin.