2017 – LIVRE « Où es Tu ? »
Il arrive qu’au cœur du désert, ou à l’horizon d’une plaine, se dresse un arbre seul. Cela suffit aux nomades que nous sommes pour que nous ne nous sentions plus seuls, pour que la création ne nous semble plus vaine. A nouveau nous assaillent des questions apparemment sans réponse mais qui, posées, pourraient être autant de réponses.
Pourquoi cette terre, considérée par beaucoup comme aveugle, inconsciente et sans direction aucune, a-t-elle abouti à une chose aussi parfaite qu’un arbre? Plus généralement, pourquoi l’anonyme immensité a-t-elle engendré chaque être, aussi minime soit-il, en son irréductible unicité? Pourquoi sommes-nous là, jouissant du privilège de voir ces choses et de nous en émouvoir, tout en sachant que nous ne venons pas de nous-mêmes? Pourquoi tant et tant de présences palpitant de vouloir-vivre?
Pourquoi tant et tant de signes vibrant d’appels et de sens? Ici, notre âme nous invite à consentir au mystère Nous qui voyons de l’univers la part visible et qui en faisons partie, sommes-nous vus? Si le voir n’était pas précisément à l’origine, serions-nous capables de voir?
Oui, nous devons être assez humbles pour reconnaître que tout, le visible et l’invisible, est vu et su par Quelqu’un qui n’est pas en face, mais à la source. Seul celui qui jouit du voir total jouit du vrai savoir et du vrai pouvoir. C’est grâce à cela que l’univers vivant est en devenir, et que nous le sommes aussi.
Un chant surgi de ma mémoire me vient aux lèvres, je vous le dédie : Un iris Et tout le créé justifié. Un regard Et justifiée toute la vie.
Texte François Cheng : De l’âme